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Chaud et froid

lundi 10 mars 2014, par jacky hérigault

"Pourquoi l’eau chaude gèle-t-elle plus vite que l’eau froide ?". Voilà un titre qu’il est beau ! D’abord parce que vous ignoriez sans doute que ça soit le cas sinon ça fait longtemps que vous feriez chauffer de l’eau pour obtenir les glaçons manquants dans le whisky de l’invité arrivé en retard, non ? Ensuite parce que le froid et le chaud, c’est du binaire, comme le bien et le mal, le noir et le blanc, le zéro et l’infini, la vie et la mort, l’amour et la haine, toi et moi, et que le binaire parle plus clairement aux esprits simples (ou au côté simple de l’esprit si vous préférez :-) que les cinquante nuances qui existent entre les extrêmes dans la vraie vie. Et puis enfin parce la question expose le paradoxe qui tue en installant le trait de désunion qu’il faut entre les deux opposés : l’eau.

La presse, et particulièrement la presse en ligne, regorge de ce genre de titres supposés hameçonner le menu fretin pour le vendre aux annonceurs publicitaires. Rien qu’au jour d’aujourd’hui [1], par exemple :

  1. "Snowden finalement plus fort que la NSA ?". Le petit et le gros, et la force comme trait de désunion
     
  2. "Pourquoi Poutine n’a plus peur de l’Ouest". Ah ? Le méchant loup, les gentilles brebis, et la peur inversée. 
     
  3. "Oh, merde, le pape a dit « putain » en pleine prière". L’homme de robe, les femmes en jupette et la prière dévoyée.

Sous les titres, les articles démontent généralement plus souvent le paradoxe qu’ils ne l’explicitent :

  1. Nulle référence au point d’interrogation dans le texte, pas de développement non plus de l’affaire Snowden, juste un rappel des pratiques de l’espionnage américain sur les réseaux virtuels.
     
  2. Dès la première phrase, l’article nous "apprend" qu’un agent du KGB bien formaté ignore la trouille, surtout devant des moutons en débandade derrière un pasteur empêtré.
     
  3. L’espagnol vernaculaire du pape a tout bêtement trébuché sur un "s" italien transformé en "zz" douteux

La problématique de l’eau qu’il conviendrait de chauffer pour accélérer sa congélation provoque d’abord chez le bon scientifique qui se croit tel un léger mouvement vertical oscillant des épaules, puis un mouvement des muscles sourciliers générateurs de rides frontales temporaires : il finit par être tenté par le titre hameçonneur. Bein ... pourquoi pas ? En tout cas, ça mérite d’aller y voir de plus près, de consulter les bonnes sources, celles qui savent tout ce qui se sait et, surtout, savent dire quand on ne sait rien. Eh bien, figurez-vous que ce hameçon-ci ne possède pas de leurre : on ne sait effectivement pas, on n’est sûr de rien, aucune expérience rigoureuse n’a jamais permis de vérifier certaines expériences empiriques tout à fait particulières montrant sans démontrer que, oui, l’eau chaude gèle plus vite que l’eau froide. Le cortège des gens de science s’y collera peut-être le jour où le réchauffement de la planète sera tel qu’il deviendra économiquement intéressant d’utiliser sa chaleur pour produire du froid ? ...

Notes

[1] Pour utiliser une expression pléonasmique que je déteste mais qui veut insister sur le fait que c’est bien en ce jour du 5 mars 2014 que je trouve ces exemples

1 Message

  • Chaud et froid 5 août 2019 16:00, par antonio

    Merci beaucoup pour cette humeur, qui prend forme dans le tout premier paragraphe comme une sorte d’énigme. Je ne savais pas auparavant que l’eau chaude gèle plus vite que l’eau froide. Je me suis rendu compte maintenant que lorsque je congèle des jus et du thé dans le même frigo, c’est le thé qui se congèle le premier. Merci pour cette publication.

    Répondre à ce message

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