Monsieur
                  le curé s'en va. Il quitte ses ouailles comme on dit, pasteur
                  s'écartant du chemin de ses brebis, guide s'éloignant de l'église
                  de ses fidèles ...  
                  Ce n'est pas sa première rupture,
                  bien sûr, mais
                  chacune l'a contraint à se retourner sur la route parcourue
                  depuis son ordination pour tenter de mieux appréhender le
                  parcours nouveau qui lui est proposé. C'est que les temps
                  changent. Pas les gens sans doute, non, mais leurs pratiques
                  dans le vent des modes occidentales. Les nantis de l'après-guerre
                  ont délaissé progressivement le Dieu de leurs aînés pour des
                  dieux plus consommables ; les libérés de 68 ont transmuté leurs
                  angoisses métaphysiques en angoisses tout court. Le territoire
                  de la paroisse s'est agrandi dans le même temps que ses églises
                  se vidaient et que les prêtres se faisaient rares. Nostalgie
                  ... Regrets aussi. Regrets de devoir quitter un environnement,
                  une paroisse, des hommes et des femmes, des âmes qu'il a mis
                  tant de temps à approcher pour une compréhension
                  jamais close.  
                Pourtant,
                monsieur le curé s'en va pour quelque part, vers d'autres gens,
                vers d'autres ouailles. Sans l'impétuosité de ses jeunes années
                sans doute, mais avec toute la sagesse acquise au cours de quelques
                décennies d'écoute et de service. Déjà, ses paroissiens l'attendent
                dans sa nouvelle terra pas tout à fait incognita. Monsieur le
                curé s'en vient ; bienvenue monsieur le curé ...
 
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