L'humeur de la semaine

Le latin, j'connais point. J'ai eu pratiqué bien sûr celui des cérémonies à l'église, au temps désormais lointain de ma jeunesse, langage ésotérique bien adapté aux mystères qu'il était censé véhiculer. Ce latin-là m'est d'une piètre utilité pour comprendre le fonctionnement de notre langue où j'ai bien du mal à distinguer les racines grecques des racines latines enchevêtrées entre préfixes et suffixes, déformées par le temps et l'usage …

Pour cette aide, il m'arrive de replonger dans mon bien vieux "petit dictionnaire des racines françaises à l'usage des écoles primaires supérieures". Une amie érudite ayant attiré mon attention sur le sens du mot "éduquer", j'ai donc plongé dans les turbulences des mots générés autour de dux, ducis, le chef.

Selon mon manuel, par déformations successives du son et du sens, ces mots se construisent autour de duc, doc, duire et véhiculent des idées comme conduire, instruire, enseigner, contenir, recevoir.

On y trouve duc et docteur, ductile et traducteur, document et doctrine, docile et éducation. Quel mélange pour un seul germe ! Un mélange étonnant quand on rapproche éducation, séduction, production, réduction, …

De l'importance du préfixe. Pour faire la différence, sinon pour faire du sens … Que signifie donc ce "é-" de "éduquer" ? Ex-duquer, conduire en dehors ? Mais en dehors de quoi l'éducation voudrait-elle conduire les jeunes ? Hors d'eux-mêmes, de leur nature, de leur vérité ? Hors des dangers de l'incivilité et de l'ignorance ? Ailleurs, sans doute, mais un ailleurs encore à définir si on en juge par les incessantes controverses et réformes qui agitent les spécialistes de notre éducation nationale. Un ailleurs dont on sait au moins qu'il est extérieur au milieu d'éducation lui-même, famille ou école se comportant comme des rampes de lancement ou bout desquelles l'envol est obligatoire. Au risque d'une autonomie jamais tout à fait certaine.