Autrefois, les anciens, bien avant que le siècle
des lumières ne chasse les ténèbres
de l'obscurantisme global, les très anciens
donc croyaient que les choses étaient vues parce
que les yeux leur adressaient la lumière nécessaire.
Les pauvres !
Aujourd'hui, les gens éclairés
pensent que l'apparence des choses ne vient que d'elles-mêmes
et n'a pas besoin de l'œil de l'homme. Un appareil
photo pourrait capter, seul, leurs images.
Il devrait même en rendre compte seul, avec toute
l'objectivité de son objectif et sans la subjectivité de
la machinerie œil-cerveau. Les pauvres !
Les Grecs anciens avaient sans doute un peu raison
d'aller se faire voir. Le regard des autres n'est-il
pas révélateur de sa propre personnalité ?
Révélations multiples, forcément.
Comment ne pas penser en effet qu'une chose génère
autant d'images que d'observateurs, quand bien même
l'appareil photo de chacun d'entre eux produit le même
cliché ? Les imageurs modernes - caméscopes,
photoscopes - sont de formidables instruments de mise
en mémoire des images rencontrées, mais
la restitution subjective de ces images passe forcément
par l'œil qui se trouvait derrière le viseur
et qui devra tenter de les reconstruire. Non ?
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