Discuter avec des gens qui savent devient vite fatigant dès lors qu’on sait ne pas savoir ni jamais pouvoir savoir. Non ? Intéressant dans l’instant mais tout à la fois roboratif et laxatif dans la durée. Les communications de certitudes personnelles et d’évidences égocentrées, qu’elles soient partagées ou non en viennent rapidement à tourner sur elles-mêmes et à centrifuger les esprits ainsi saoulés.
C’est qu’il est difficile d’échapper au piège de ces monologues de groupe qui rebondissent les uns sur les autres, s’alimentant les uns des autres, s’excluant tour à tour à force de voix et de knock-down caféducommerciques. Sauf à jouer les bourrus infréquentables, les plus dubitatifs quant à leurs propres vérités s’y laissent prendre et les posent plus ou moins fermement dans le flux verbal comme des jetons validant leur présence.
J’exagère ... Mais je n’en pense pas moins ! Chacun peut témoigner que les dialogues véritables existent et qu’il en a rencontré. Rencontré et vécu de ces discussions qui construisent une vérité du groupe occasionnel à partir des doutes de chacun ; de ces conversations où l’écoute et l’entendement précèdent la parole, où les suppositions remplacent les présupposés, où rien n’est définitif qui ne soit avec le sentiment et l’assentiment de tous, d’où tout point final est donc exclu.
Ces rencontres de vérité(s) sont trop rares et trop brèves, faute sans doute de savoir les cueillir sur le bord de la route, les pêcher au fil de l’eau, les provoquer peut-être au gré d’une étincelle. Le silence radio n’étant la solution que dans la discussion avec soi-même et l’au-delà qui peut s’y trouver, il est sans doute préférable de continuer à marcher, naviguer et entretenir la flamme ... l’esprit aux aguets.