Je suis contre le suffrage universel qui incite les impétrants à brosser leurs électeurs potentiels dans le sens du poil, évitant de leur dire les choses qui fâchent, et les élus à légiférer et gouverner l’œil rivé sur les résultats des sondages qu’ils commanditent eux-mêmes avec l’argent commun. Pourtant, singeant Sacha et les deux frères, je dirais même plus : je suis tout contre. Parce que je crois finalement que, hors les urnes, point de salut pour une démocratie.
C’est que je l’aimerais avec un autre logiciel comme on dit maintenant dans les milieux branchés pas forcément geek. La boîte à bulletins accessible tous les cinq ans serait remplacée par des clouds alimentés continûment en humeurs, souhaits et autres idées citoyennes. Les volontés du peuple ne seraient plus évaluées au doigt mouillé et plus ou moins zypocrite des zeureux zélus mais affichées au sortir d’une moulinette informatique construite selon les règles de la Constitution de la République.
Utopie ? Voyez comment Google cerne les us et coutumes, appréhende les intentions et les pensées, capte les vents laissées par chacun et par tous sur l’internet, pour nos petites commodités et pour son plus grand profit. Certes la France n’a pas les épaules de Google, mais une petite démocratie de 60 Mo [1] comme la nôtre n’est pas non plus le vaste monde googlesque.
Un exemple ? J’aimerais bien que les décideurs me demandent mon avis sur les choix énergétiques. Les élections qui se profilent seraient l’occasion de m’exprimer si je pouvais voter à la fois pour chacun des candidats possédant une parcelle de ma vérité ou si, votant pour celui qui me conviendrait tout à fait dans ce domaine, je ne cautionnais pas ses choix dans d’autres domaines qui ne me siéraient point. Et cet avis donné dans l’ urne le serait pour cinq ans alors que les temps - climatiques, scientifiques, économiques et politiques - changent si vite !
J’aimerais que les grands ordonnateurs de l’État alimentent en continu le grand ordinateur national en opinions citoyennes (contradictions comprises), en savoirs scientifiques (polémiques comprises), en données économiques (arnaques comprises), en argumentaires idéologiques (utopies comprises). Les promesses électorales tiendraient plus clairement au positionnement des différents curseurs corrélés de la machine magique : plus ou moins de social, plus ou moins de sécurité, plus ou moins de confort, plus ou moins d’écoles, de prisons, de porte-avions, de maisons de retraites, de centrales nucléaires ... C.Q.F.D