lundi 10 septembre 2007
Apprenti, assistant
Quand j’étais petit, vers les huit – dix ans, j’assistais mon père dans ses travaux d’électricien du bâtiment. À l’époque, les installations électriques étaient réalisées sous moulure de bois. Il fallait pointer des canalisations creuses le long des murs et des plafonds pour alimenter les lampes et les prises de courant en électricité ainsi que pour relier les interrupteurs aux lampes. Puis, il fallait allonger les fils d’aluminium dans les logements prévus et recouvrir le tout d’un couvercle de bois fixé à l’aide de toute petites pointes. Vous voyez le topo ? Les prises de courant et les interrupteurs en porcelaine étaient ensuite fixés aux murs et les fils électriques y étaient raccordés. Pour réaliser ces travaux, il fallait de la moulure de différents calibres, des fils électriques de différentes sections, l’appareillage utilisateur, des pointes, des vis, et puis, côté outils, peu de choses suffisait : un escabeau, un petit marteau « à ferrer les lapins » comme aimait à dire mon père, un tournevis, une pince coupante, une boite à coupe d’angle et un couteau pas trop coupant, lui, tout juste bon à dénuder l’extrémité des fils à raccorder, sans blesser l’âme métallique ni se blesser soi-même, bien sûr, ce qui arrivait quand même assez souvent, bien des pouces s’en souviennent encore.
J’assistais donc mon père, touboutchou immergé dans ces jeux de grands et qui en faisait un jeu de mon âge, un jeu d’anticipation où j’essayais de comprendre la suite logique des opérations menées par mon père qui allait et venait dans toutes les dimensions de chaque pièce, alternant les outils et les matériaux. Et lorsque j’avais compris – et, bien sûr, avec la pratique, je comprenais de plus en plus souvent et de plus en plus vite, ma récompense était de préparer et, éventuellement de tendre à mon père perché en haut de son escabeau ou agenouillé devant une prise de courant l’objet qu’il s’apprêtait à aller chercher. J’apprenais les leçons du métier à coup de gentilles humiliations lorsque je voyais mon père constater ma carence et se déplacer lui-même, ou bien même lorsqu’il avait besoin de me faire une demande. Des leçons que j’imaginais déjà indispensables si je voulais me donner l’illusion de l’aider ...
|