mamimadi l'humeur hebdomadaire |
6 juillet- Attaque cérébrale Je ne me souviens plus dans quelles conditions je me suis retrouvé au premier balcon d'un théâtre ou se produisait Johnny. Mes souvenirs commencent vaguement avec l'image d'une ouvreuse toute vêtue de rouge et relativement désagréable sans que je puisse maintenant en dire davantage. Le vieux chanteur, un peu défiguré et mal rasé chantait couché, allongé sur un lit posé face au public, le tronc adossé à de gros oreillers de façon à ce que son organe de travail puisse donner toute la puissance qu'on lui connait. Bizarrement, l'ouvreuse était installée au milieu du parterre, bien visible dans son tailleur rouge. Dès la première chanson, j'ai senti une agitation parmi les spectateurs situés en arrière de ma position, sans doute même juste derrière moi, agitation qui s'est rapidement amplifiée au début du deuxième titre au point que Johnny s'est arrêté de chanter en figeant son &oeilig;l battu dans notre direction. Le bruit iconoclaste persistant, l'ouvreuse m'a jeté un regard noir, présumant vraisemblablement que je devais en être la cause. Ma tête ahurie et dénégative ayant réussi à la persuader de mon innocence, elle a porté ses reproches vers la rangée suivante. Pour je ne sais quelle raison - peut-être parce que dans l'ambiance sacro-sainte d'un espace tout entier tourné vers la scène, en détourner le regard a quelque chose de sacrilège - je n'osais me retourner pour tenter d'identifier le fauteur de trouble. L'attente me parut longue. Au bout de quelques secondes le bruit très reconnaissable d'une personne quittant son siège se fit entendre. Quelque secondes encore et je vis un homme passer dans une allée du parterre, en chemise plutôt claire, plutôt enveloppé lui-même, un peu chauve. Étrangement, il portait une mallette bleue, d'un bleu assez particulier dont je me souviens précisément encore aujourd'hui. Alors qu'il avait légèrement dépassé notre hauteur, je l'ai vu, comme tous les spectateurs et un Johnny pas plus surpris que ça, s'arrêter, se retourner lentement, ouvrir prestement sa mallette, en ressortir une arme que j'aurais du mal à définir, et puis tirer à grands traits dans toutes les directions. Vous ne me croyez pas, n'est-ce pas ? Vous avez tort : j'y étais, je vous dis ! Sans attendre mon reste (vous me connaissez :-), je me suis carapaté à quatre pattes derrière l'ensemble des spectateurs apparemment paralysés, dans un assourdissement de détonations nourries et saccadées dont mes oreilles se souviennent encore elles aussi. Je me suis retrouvé à l'intérieur d'une pièce sans issue ou quelques personnes s'étaient également fourvoyées. Ça n'est qu'à ce moment qu'une odeur de panique a titillé mes faibles neurones. Et s'il venait ici, quelle échappatoire aurions-nous ? Il faut en sortir, et vite, sortir de la pièce borgne, du cauchemar si souvent vécu par petits écrans interposés. Une, deux, trois enjambées, une autre pièce, plus grande, plus claire, avec une ouverture sur l'extérieur. Une fenêtre à ouvrir, un appui à enjamber, une cascade comme on en fait quand on n'a plus rien à perdre pour accéder à l'étage inférieur, un rétablissement au pied du mur d'enceinte dont le franchissement vers la sécurité définitive ne sera qu'une formalité. Ouf ! Pour une fois, le cauchemar se termine bien, avant le réveil complet du dormeur, ce qui fut bien agréable, les quelques minutes suivantes étant disponibles pour apprécier à leur juste valeur le déroulé de la construction mentale que mon inconscient venait de proposer à ma conscience.
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