mamimadi l'humeur hebdomadaire |
26 août - Trois fois un·e C'est une dame d'un certain âge. Une vielle dame, si vous préférez. Elle a sonné à ma porte cette semaine pour me signaler que le mimosa de mon jardin risquait d'abîmer sa toiture. Gentiment, comme une prière. Sur le pas de la porte, elle m'a redit - car sa demande m'avait déjà été présentée dans le passé - qu'elle ne pouvait pas elle-même réduire la végétation débordante. Je savais son mari physiquement diminué depuis longtemps, elle m'a appris son décès récent. Elle a ajouté qu'elle-même était entrée dans les angoisses de la maladie d'Alzheimer et des larmes légères lui sont venues. "Accepteriez-vous d'entrer prendre un café ?". L'invitation était incontournable, irréfléchie. Sur ma terrasse, devant un petit expresso, elle a pu voir l'envers de son décor et je lui ai donné un peu de l'histoire du mien. Aujourd'hui, j'élaguerai mon mimosa en pensant un peu différemment à ma voisine... Ce n'est plus une jeune fille, pas encore une dame, même jeune. Vingt-et-un, vingt-deux ans, pas plus. Elle vient de passer quelques jours sous mon toit et peut revenir quand elle veut. Le rire d'un enfant et le sérieux d'un adulte. Une spontanéité raisonnable. Un ensemble de qualités, d'attitudes et de comportements oxymoroniques : elle affirme prudemment et doute sereinement, travaille dur et se repose intensément, se préoccupe des autres sans s'immiscer outre mesure, programme son avenir sans se préoccuper avant l'heure de toutes les options. Le vieil homme que je suis pense parfois qu'elle devrait s'inquiéter un peu plus, assurer davantage, s'informer et se former encore et encore, mais alors serait-elle encore elle-même ? Et ce serait bien dommage. Il vit chez moi depuis quelque temps maintenant. Je le supporte parce qu'il est un peu de la famille mais il ne me rend pas la vie facile. Il s'est mis en tête récemment de se remettre en selle pour entretenir sa petite santé. Il pédale à tout va, à travers routes et chemins, surveillant son cardio, son souffle et sa balance. Il m'inquiète. J'ai beau lui suggérer parfois qu'il ne faut pas rêver vu son âge avancé, il n'en démord pas, me renvoie vertement à mes occupations de petit père tranquille et repart cavaler au-delà du raisonnable, je le crains. Il m'est pourtant difficile de cesser de m'en préoccuper. C'est moi. |