"C'est dans la disproportion de nos désirs et de nos facultés que consiste notre misère". (Jean-Jacques Rousseau).
Bien vu, Jean-Jacques ! Deux développements tout à fait persos :
Considérons d'abord monsieur Poutine qui pourrait cacher sous une sérénité peut-être médicamenteuse une misère profonde. Son désir de reconstruction d'un très ancien passé national glorieux semble immense, irrépressible, alors que ses moyens humains et matériels se révèlent pour le moment et pour longtemps encore largement insuffisants. D'un côté de la balance, des désirs plus modérés et plus raisonnables l'auraient sans doute incité à préférer la négociation (et la ruse connexe) à la violence bête et brutale. De l'autre côté, des moyens bien supérieurs lui auraient permis d'annexer l'Ukraine (et le reste, dans la foulée) en une petite semaine. Dans les deux cas, il aurait évité la misère, la sienne, goutte de pleurs dans la misère répandue sur le Globe, mais surtout celle de tout une population globalement meurtrie, comptant de nombreux blessés, déplacés, tués.
Considérons maintenant l'auteur de cette petite humeur. Non pas qu'il éprouve le désir d'annexer la propriété de son voisin dont le terrain faisait jadis partie d'un même ensemble, juste qu'il se demande pourquoi il ne se sent pas immergé dans une quelconque misère, physique, intellectuelle ou morale. N'aurait-il aucun désir ? Ses moyens dans ces trois domaines lui permettraient-ils de les combler dès que ressentis ? Après réflexion, il a tendance à penser que c'est la faiblesse même de ses moyens qui borne ses désirs : il ne veut que ce qu'il peut vouloir...
Pour contrer la disproportion entre les désirs et les facultés habituels et sortir ainsi le nez du ruisseau rousseauiste de la misère, considérons enfin cette citation de Gaston Bachelard qui semble suggérer la configuration idéale où les désirs sont réalisés par les facultés de l'imaginaire : "D'abord, il n'y a rien, ensuite un rien profond, puis une profondeur bleue". Oui ?