mamimadi l'humeur hebdomadaire |
20 novembre- Tom et Jac Allez, j'y vais ! Enfin... j'y reviens. Comment ne pas revenir en effet cette semaine sur le spectacle proposé par Jacques Gamblin au théâtre de Saint-Nazaire ? Quel homme que cet homme-là ! Quel comédien mais quel écrivain aussi ! Il triture les mots et les caresse dans le même geste. Il les susurre et les gueule dans la même phrase. Il les danse même au rythme dans lequel il semble vouloir entraîner son public. Excès de prudence sans doute que ce "il semble" tant il paraît difficile pour le plus roué des comédiens de paraître aussi authentique. Ce n'est plus un comédien qui s'est produit à Saint-Nazaire, mais un artiste qui s'est exposé au travers de ses créations. Il a revécu devant nous les messages envoyés quotidiennement à son ami Thomas Coville, navigateur solitaire sur son grand trimaran en route pour une nouvelle tentative de record autour du monde. Messages lancés au-dessus du grand désert salé, sans demande d'accusé de réception, sans l'assurance qu'ils parviennent jusqu'à leur destinataire, et donc dans l'ignorance de l'accueil que celui-ci pouvait leur faire. Il écrivait, parlait, criait à quelqu'un, mais dans le vide ses mots étaient justes, non pas exacts comme l'auraient été ceux d'un marin coutumier de la course au large, mais humains, simplement mais infiniment humains comme ceux d'un terrien qui tente le grand plongeon et l'immersion dans la tête du marin, du lutteur, de l'homme en course. Chaque jour il écrivait, y compris lorsque le pot au noir et les bras de Sainte-Hélène ont retenu le bateau de Tom et ralenti la progression du petit point sur l'Atlas de Jac. Jusqu'à l'abandon. Et c'est peut-être alors que les textes sont les plus forts, parce que les décisions sont difficiles et que les qualités humaines l'emportent sur les performances purement physiques. Et puis Tom répond à Jac. Brièvement mais tellement profondément d'abord et puis de plus en plus explicitement jusqu'à la rencontre physique des deux hommes sur les pontons du retour. Quel exercice d'équilibrisme sur le fil des incertitudes humaines ! Au lendemain de ce spectacle, j'ai voulu revoir la prestation de Jacques Gamblin donnée à Nantes, au Lieu Unique, le 28 novembre 2015 lors d’une journée consacrée au rôle de la poésie pour livrer « autrement le monde » (Voir sur le site du Monde). Et je me suis dit qu'à l'heure des débordements en tout genre, nos sociétés ont bien besoin de ces bains de bon sens poétisé, de poésie immergée. Non ? |