La journée fut copieuse, kilomètres avalés et rencontres fructueuses. Le premier camping rencontré sur la route fit l'affaire lorsque l'heure fut venue de se poser pour la nuit. L'endroit n'était d'ailleurs pas inconnu puisque, situé à mi-chemin du parcours qui mène de ma petite demeure aux pentes douces de notre Massif Central, il a été l'occasion de quelques haltes antérieures.
Nous étions début septembre, les enfants étaient à l'école et leurs parents au travail. Seules quelques libérés des obligations sociales ou familiales hantaient les lieux et la soirée s'annonçait bien calme, sans criaillements ni atteintes à la bienséance. Allez savoir pourquoi, il m'a semblé alors que l'entrée en calmitude devait passer par une bonne douche vespérale, moi qui ne jure habituellement que pas la douche matinale...
Les sanitaires des campings peuvent être assez différents de l'un à l'autre. Les cabines de douche de celui-ci étaient presque anormalement grandes, ce qui donne d'entrée une bonne impression : les vêtements, les chaussures et même une partie du sol carrelé ont davantage de chance d'échapper aux éclaboussures. Dès la porte de l'une d'elle poussée, il m'a semblé que le bac en grès émaillé, large et profond, attendait que j'y pose le pied...
Vous me voyez venir, non ? Parce que moi, je n'ai rien vu venir. Le premier pied posé, le droit si je me souviens bien, est parti en dérapage sur toute la largeur du receveur bien avant que le pied gauche ne puisse lui porter assistance. En une fraction de seconde j'ai eu le temps de me demander dans quelles conditions mon atterrissage allait se dérouler. La hanche, c'est fait. Le coude maintenant, douloureux mais sans doute pas de casse. Attention à la tête, pourvu que...
La tête n'a pas morflé, merci. Les neurones purent se calmer, faire un état des lieux et décider qu'à défaut d'être réparatrice et apaisante, la douche laverait les plaies quelque peu sanguinolentes en et permettrait d'y voir plus clair.
Trois jours plus tard... Pas de séquelles en dehors d'une hanche commotionnée et d'un coude en phase de cicatrisation superficielle, mais l'événement m'est revenu à l'esprit assez souvent pendant mes petites randos montagnardes, alors que je m'astreignais constamment à peser la dangerosité d'un sol devenu glissant après les premiers orages post-caniculaires. Devrais-je désormais entrer dans les douches de rencontre avec la même circonspection ?