mamimadi l'humeur hebdomadaire |
28 décembre- Trans-lucidité Eh bien oui, la vieillesse est un naufrage et ceux qui l'ignorent ou le nient se préparent de douloureuses désillusions. Le bateau lancé sur l'eau n'a pas de port et doit naviguer enore et encore, avec sa coque vieillissante, un grément rafistolé, un équipage fatigué. Ses fortunes de mer sont plus ou moins nombreuses, surviennent plus ou moins tard jusqu'à l'inévitable dernière qui l'enverra au fond de l'eau. De ralentissements en limites nouvelles, de courbatures en blocages nouveaux, de défaillances en abandons, l'avancée en âge de ceux qui ont la chance de ne pas mourir jeunes suit la règle commune, évidente et définitivement incontournable. Mais on peut encore y voir une chance. Pour deux raisons. La première est le remplacement du "toujours plus vite, plus haut, plus fort" de la jeunesse conquérante par le "toujours nouveau" de celui qui doit s'adapter, mettre un savoir-faire acquis au service du pouvoir-être défaillant. Et le défi, loin d'être triste, peut avoir le même niveau d'enthousiasme que les défis du toujours plus, de toute façon asymptotique. La seconde est justement ce pouvoir être déclinant naturellement, à la vitesse d'une compréhension humaine invitée à savourer encore une navigation devenue molle et parfois grinçante, dangereusement exposée au premier coup de tabac un peu rude, inexorablement conduite vers la dissolution dans l'intense brouillard ou la dislocation sous la vague tueuse. Elle n'est pas belle, la vie ? Non, elle n'est pas vraiment belle quand surviennent des naufrages précoces d'embarcations encore allantes, capables des près les plus serrés dans les brises énergiques. Mais quand les naufrages ne surviennent pas, quand ils sont dans la ligne des choses prévisibles, parfois prévues et - si on le veut bien - raisonnables ? Humeur tristounette, cette semaine ? Pas vraiment si on y réfléchit bien. Optimiste même, bien dans le ton de Noël et du Nouvel An, de cette période de re-commencement à vivre, de bord nouveau à tirer dans la grande traversée ... avec le brin de lucidité qui nous a si chichement été donnée. |