mamimadi l'humeur hebdomadaire |
7 mars- Trois vies En l'absence d'alerte de santé, chacun pense qu'il a toute la vie pour vivre sa vie - à moins qu'il n'ait toute sa vie pour vivre la vie. Avec raison : quelle qu'en soit la durée, c'est bien toute la vie qui (r)est(e) à vivre pour chacun de nous. Mais toute la vie, ça n'est pas assez : il en faudrait trois, pas moins, pas plus. Une première d'abord, celle que nous connaissons, dans laquelle nous errons à tâtons, d'erreur en coup de chance, d'échec en réussite ; nous en apprenons et nous la terminons munis d'expérience et de sagesse voués à l'inutilité sauf à les exploiter dans une deuxième vie. Quel bonheur pourrait être cette deuxième vie, réellement vécue, construite en toute conscience du jeu, de son domaine, de ses règles et de sa durée ! Seule la perspective de sa fin pourrait en assombrir le déroulement si n'existait l'espérance d'une troisième vie. Durant cette troisième vie, on serait à l'aise, on ferait le malin, on roulerait les yeux fermés ; les écarts de conduite seraient nombreuses, les accidents aussi. Suivre les voies de l'expérience et de la sagesse seraient perçues pénibles, leurs voix ne seraient plus entendues. Sans valeur ajoutée à cette troisième vie, une quatrième serait une troisième-bis ... Mais les choses sont mal faites, n'est-ce pas ? L'existence de plusieurs vies n'est pas "scientifiquement" démontrée et nous n'avons donc qu'une vie, a priori. Nous n'avons pas la chance de ce prof de physique devant mettre en œuvre un nouveau programme. La première année le voit hésiter, tâtonner, construire son cours, imaginer des expériences, analyser les réussites à renouveler, les demi-réussites sur lesquelles rebondir, les demi-échecs améliorables et les échecs complets à ne pas renouveler. Il y acquiert l'expérience qui fera de sa deuxième année une année réussie dont il sera fier et qui lui permettra d'envisager une troisième année "les doigts dans le nez". Plus besoin de préparer les cours puisqu'ils sont au point, aucune nécessité à construire les manipulations puisqu'elles ont fait leurs preuves. Mais les petits détails oubliés, les petits accrocs dans les protocoles expérimentaux, le petit relâchement forcément perçu par les élèves, tous ces petits riens ternissent cette troisième année. Il est temps de changer de niveau ou de programme. En l'absence d'alerte de santé ... S'il faut trouver des côtés positifs à ces alertes, tant qu'elles ne sont que des alertes, on peut les considérer comme des ponctuations de la vie. Il y a l'avant et il y a l'après de chacune de ces ponctuations aux multiples facettes : point d'exclamation manifestant la surprise d'être atteint par la maladie, point d'interrogation qui remet en question la vie d'avant, point de suspension attendant la vie d'après avec l'expérience de la vie d'avant. Aurions-nous besoin de trois plages de vie pour avoir le sentiment d'en avoir fait le tour ? Cette troisième image un peu délabrée à peine posée, il m'a été donné d'assister à un spectacle contredisant ma petite idée de la suite 2>1>3 comme ordre de qualité décroissante des réalisations humaines. Certes, au cours de la deuxième prestation, les acteurs m'ont semblés plus sûrs d'eux-mêmes et, par certains aspects, le spectacle m'en a semblé plus fluide, mais un moindre stress, voire un excès de décontraction ont permis un certain nombre d'accrocs qui m'ont, finalement, fait paraître ce deuxième spectacle un peu moins bon que le premier. J'attends la troisième édition avec impatience ... |